« Je pense que les peuples ont pris conscience du fait qu’ils avaient des intérêts communs et qu’il y avait des intérêts planétaires qui sont liés à l’existence de la terre, des intérêts que l’on pourrait appeler cosmologiques, dans la mesure où ils concernent le monde dans son ensemble ».
Pierre Bourdieu (1992)


mercredi 21 novembre 2018

Aaron Cicourel, La justice des mineurs au quotidien de ses services


Aaron Cicourel
La justice des mineurs au quotidien de ses services 
Traduit de l'américain par Samuel Bordreuil
Institut d'Etudes Sociales 
Le geste social 
2018 


Présentation de l'éditeur
Publié pour la première fois en 1968, puis réédité plusieurs fois The Social Organization of Juvenile Justice (titre original) d’Aaron Cicourel appartient à la catégorie des classiques de la littérature sociologique. Près d’un demi-siècle après en voici une traduction en français.

Suivre les trajectoires des mineurs, supposément délinquants, pris qu’ils sont dans les mailles de leur justice; suivre au plus près – sur quatre ans, partageant leur quotidien - ceux qui les suivent : policiers, personnels du Contrôle Judiciaire. C’est-à-dire retracer, d’un entretien à l’autre, d’un rapport au suivant, l’avancée des dossiers que ces services instruisent sur ces jeunes, traquant ainsi ce qui dans ces dossiers, par déports successifs, tout à la fois éloigne du théâtre originel des frasques des mineurs leur ayant valu de tomber sous le radar, et permet in fine de boucler leurs cas comme manifestant le socle d’une histoire sur lequel ancrer verdict et préconisation : telle est la matière vive du livre ; et, d’aborder la sociologie de la délinquance, non par les délinquants, mais par ceux (les services) qui les réputent tels et ainsi les génèrent, voilà sa singularité.

En même temps, le livre d’Aaron Cicourel fait date, non seulement dans le champ de la sociologie de la déviance, mais dans l’histoire même de la sociologie parce qu’on y trouvera, noué comme rarement, un entrelacs réflexif entre singularité d’objet et potentiels des diverses méthodologies susceptibles d’honorer cette singularité. Un pied dans les ‘communities studies’ ; un autre dans la grille analytique de l’ethnométhodologie sans, pour autant, que les approches statistiques y passent par pertes et profits.
A tous égards, aussi bien pour ceux pour qui la délinquance et/ou la déviance est l’objet central de leurs recherches, que pour la corporation sociologique dans son ensemble soucieuse de savoir ‘où elle en est’, la lecture de ce classique enfin traduit apportera beaucoup.  

Aaron Cicourel (1928-) est Professeur émérite de l'Université de Californie à San Diego (UCSD). Il a reçu le doctorat honoris causa de l’Université de Fribourg (2007) et de la Complutense Université de Madrid (2008). Une part importante de ses ouvrages a été traduite en allemand, japonais, espagnol ou français (Editions du Seuil). Il constitue une figure centrale des sciences sociales de la seconde moitié du 20e siècle. Il a été introduit au public francophone par Pierre Bourdieu qui a veillé à la diffusion de son œuvre. Outre la délinquance juvénile, ses recherches innovantes ont porté sur des domaines variés : les méthodes d’enquête en sciences sociales ; le raisonnement médical en situation d’entretien entre médecin et patient ; le rapport entre aptitudes langagières et performances scolaires. La rigueur scientifique d’Aaron Cicourel s’est toujours accompagnée du souci de mettre la sociologie au service de la société, et en particulier des acteurs sociaux sur lesquels portaient ses recherches, afin de contribuer à la réflexion sur leurs conditions d’existence et, quand cela était possible, à leur amélioration.

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