Du romantisme au symbolisme, la «
poésie pure », formule de combat contre toute soumission du langage
poétique à des fins instrumentales, tend à s’imposer en valeur
directrice au sein du microcosme des poètes : « La poésie n’a pas la
Vérité pour objet, elle n’a qu’Elle-même », affirme Baudelaire en 1857.
Pascal Durand s’attache à montrer que cette poésie de plus en plus
repliée à l’intérieur de ses propres signes revêt des dimensions
sociales spécifiques. Suivant une démarche nourrie de sociologie de la
littérature et de rhétorique des textes, il y procède à deux échelles.
Tantôt par l’examen de configurations répondant aux dynamiques de
différenciation et de coalition du champ littéraire moderne :
l’offensive des romantiques contre le formalisme, la doctrine de combat
de Leconte de Lisle, le rapport officiel de Gautier sur les « Progrès de
la poésie » en 1867, ou le Tombeau à la mémoire du même Gautier
orchestré par les parnassiens. Tantôt par des lectures rapprochées,
mettant en relief les opérations qui assurent, au cœur des textes,
diverses médiations du social : transposition des structures du système
poétique chez Mallarmé, mécanisme parodique des « beau comme » chez
Lautréamont ou poétique du décor chez Laforgue.
De la « forme idée » portée par Hugo à « l’initiative aux mots » chez
Mallarmé, en passant par la prose furieuse des Chants de Maldoror,
réflexivité faite œuvre, une troisième perspective se dessine : celle de
théories proprement poétiques de la signification dont certains
principes continuent de régir notre conception de la poésie.
Professeur ordinaire à la Faculté de Philosophie et Lettres de l'université de Liège, Pascal Durand a notamment publié Mallarmé. Du sens des formes au sens des formalités (2008) et La Leçon des choses. Techniques imaginaires de Daniel Defoe à Georges Simenon (2021).
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