La fin des Indigènes en Nouvelle-Calédonie
Le colonial à l'épreuve du politique 1946-1976
Préface de Alban Bensa
Karthala
2013
Présentation de l'éditeur
Comment peut-on se décoloniser ?
L’action politique peut-elle contribuer à une émancipation ? Peu après
1946, après plus d’un siècle de répression, de spoliations foncières et
de cantonnement dans des réserves, les populations colonisées de
Nouvelle-Calédonie accèdent au suffrage universel. L’expérience est
unique dans l’Empire colonial français. Elle l’est aussi si on la
compare à d’autres sociétés coloniales.
Des élus « indigènes » apparaissent et
accèdent à ce statut nouveau de représentants. Jusque dans les années
soixante-dix, cette première génération de dirigeants invente « la »
politique dans le monde « indigène ». Ils pénètrent dans des assemblées
représentatives, organisent des réunions publiques, défendent des
intérêts, font campagne. Pourtant, ils ne se révoltent pas. Ils ne
parlent pas des injustices dont ils ont été les victimes et se disent
Indigènes et Français. Pendant trente ans, alors que la plupart des
colonies françaises deviennent indépendantes, ils proclament au
contraire leur attachement à la France. C’est à croire que le cadre
démocratique a fini par produire un consentement.
En réalité, se jouent les conditions
d’une révolte impossible. Lorsque l’on se situe au plus près de leur
trajectoire et de leurs expériences, on saisit mieux les logiques de
leur positionnement, de même que les tensions sociales et personnelles
qui traversent leur histoire mouvementée. En s’engageant dans ce monde
colonial, ces élus portent et supportent tout ce qu’il a de
contradictoire. Ils franchissent des frontières sociales et coloniales
jusqu’alors interdites. Ils usent de toutes les formes de légitimité
politique, religieuse, coutumière. Avec eux, des certitudes vacillent :
c’est la fin des « Indigènes » et l’avènement d’un autre possible.
Éric Soriano, anthropologue et
historien de formation, est maître de conférences en science politique à
l’Université Paul-Valéry de Montpellier. Il est chercheur au Centre
d’études et de recherches comparatives en Ethnologie (CERCE-Montpellier
3) et au Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris
(CRESPPA-Paris 8).
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