Festival Raisons d’agir 2013 : «Éducation et émancipation»
Poitiers, du 3 avril au 5 avril 2013
-
Pour sa huitième édition, le Festival Raisons d’Agir réfléchira
aux rapports entre «éducation» et «émancipation». Fidèle à sa formule, le
festival associe le regard objectivant des chercheurs à celui, plus subjectif,
des artistes, des militants et des étudiants, afin de mener une réflexion
collective sur les débats politiques contemporains et ainsi d’y prendre
part.
Éduquer pour émanciper. Instruire le peuple, les femmes, les reclus, les
opprimés contre l’emprise des traditions et de toutes les formes de
domination. Apprendre par soi-même, les uns des autres, pour conquérir sa
liberté, pour le plaisir d’apprendre. Tels furent les mots d’ordre des luttes
pour l’instruction publique et des mouvements d’éducation populaire, avec ou
contre l’action conduite par l’Etat, en lien ou non avec les prophéties
révolutionnaires.
Longtemps, il fut surtout question d’instituer l’égal accès à l’instruction.
Des « Lumières » aux luttes ouvrières et féministes, de la création de
l’école républicaine aux vagues de démocratisation scolaire du XXe siècle,
l’idée s’est peu à peu imposée que l’éducation était un droit pour tous et
que chaque citoyen devait disposer des moyens de son autonomie. La contestation
est également venue de l’intérieur ou des marges du système d’enseignement,
contre les formes d’autoritarisme et de compétition que drainaient avec elles
les traditions pédagogiques et les structures scolaires. Il s’agissait alors
d’instaurer une « éducation nouvelle », plus coopérative, plus sociale. Hors
les murs, les mouvements de jeunesse s’essayaient aux « méthodes actives ».
Les enseignants eux-mêmes se divisaient entre « anciens » et « modernes ». La
révolution éducative se retournait contre le pouvoir des clercs.
Mais déjà, un autre bouleversement était à l’œuvre. L’instauration de «
l’école pour tous » finissait elle-même par produire son lot de
désillusions. La critique sociologique mettait à mal le mythe de « l’école
libératrice ». Et la statistique scolaire ne cessait de confirmer que la
massification de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur ne
réduisait en rien les inégalités. Dans le fonctionnement ordinaire du
système d’enseignement, chacun était en quelque sorte renvoyé à lui-même,
à ses « talents », à sa « nature ». La réforme scolaire contribuait malgré
tout à des mouvements d’émancipation, à celui des femmes tout
particulièrement. Mais le progressisme scolaire perdait peu à peu de sa force
d’entraînement, en même temps que s’installait un climat de consumérisme et
d’individualisme cynique. Les mouvements pédagogiques et les associations
d’éducation populaire voyaient leur base militante s’effriter peu à peu.
À la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle, la révolte est
revenue par un autre côté, contre la montée en puissance d’une vision
marchande, utilitariste et instrumentaliste de l’éducation. L’école serait de
plus en plus conçue comme un moyen d’améliorer l’employabilité des futurs
travailleurs et la croissance économique. Les luttes scolaires reprirent de la
vigueur en même temps que s’inventait l’altermondialisme. Alors que le
mouvement d’extension de la scolarisation semblait être durablement bloqué,
le droit à l’éducation était exigé sous de multiples formes, dans les
luttes des territoires déshérités comme dans la défense de programmes
scolaires universalistes, dans la solidarité avec les enfants de sans-papiers
comme dans la défense de l’organisation nationale de l’institution
scolaire.
Où en est-on exactement aujourd’hui? Quels sont les enjeux actuels de la
réforme éducative dans le contexte de la refondation de l’école annoncée
par le nouveau pouvoir en place ? Quelles formes prennent les tensions
contemporaines entre tendances objectives au maintien des inégalités,
renoncement ou désenchantement et volontarisme politique? Par quelles voies
s’invente aujourd’hui une école ambitieuse pour tous, démocratique? Quels
faux-semblants mais aussi quels espoirs se dessinent sous nos yeux,
s’expérimentent ici ou là ?
Programme
SAMEDI 23 MARS
PLACE DU MARCHÉ NOTRE-DAME
10h30 – 12h30 – Présentation festive
Avec la participation de la Brigade d’Intervention Poétique et de la Maison de
la poésie.
MERCREDI 3 AVRIL
PRÉAMBULE À L’UFR DE SCIENCES HUMAINES ET ARTS, AMPHI BOURDIEU
13h30 – Une école pour émanciper?
Table-ronde avec Choukri Ben Ayed, professeur à l’université
de Limoges (GRESCO), Samuel Bouron, doctorant (CURAPP),
Étienne Douat, maître de conférences à l’université de
Poitiers (GRESCO), Bertrand Geay, professeur à l’université
de Picardie (CURAPP) et Stanislas Morel, maître de
conférences à l’université de Saint-Etienne (ECL).
Au moment où le projet de loi d’orientation pour la « refondation » de
l’école va entrer dans les faits, on peut s’interroger sur ce qu’il en est des
conceptions explicites ou implicites qui caractérisent la politique
gouvernementale sur l’éducation. Et s’efforcer de les mettre en perspective à
partir des connaissances sociologiques.
À L’ESPACE MENDÈS-FRANCE
17h – « Sur l’école »
Intervention – lecture par un groupe d’étudiants de lettres de l’université
de Poitiers. Présentation par Véronique Rauline, maître de
conférences, universités Paris-Ouest Nanterre et Poitiers.
18h30 – Projections
Présentation par Benoit Perraud, réalisateur et
programmateur.
100 Jours+ 41 de Delphine V. Lambert & William
Lambert, France / 2012 / 4 min
Issu de la série « 100 jours ». http://100jours2012.org
France, détours, ce trait, c’est ton parcours de Frédéric Moser & Philippe
Schwinger, France / 2011/ 53 min
Le film se décline dans le concret des actions pédagogiques d’une structure
pionnière qui accueille les élèves exclus temporairement de l’école pour
des raisons de discipline. Le local se situe dans l’enceinte d’un collège ZEP
(zone d’éducation prioritaire) en banlieue parisienne. Des éducateurs
encadrent ces écoliers récalcitrants et abordent les raisons de leur
sanction. Il est question de contrat, de rôles donnés et de rôles à
prendre. Les réalisateurs observent attentivement comment les en- fants
reçoivent la parole des adultes, leur écoute, leur ennui, leur refus, leur
acquiescement…
Les films de Frédéric Moser et Philippe Schwinger interrogent le présent
à partir de faits politiques et sociaux issus de l’histoire récente. Ils
remettent alors en scène les sources de la réalité contemporaine, pour les
placer dans le lieu de discussion d’un conflit. En 2009, Moser et Schwinger
initient le projet d’une série de quatre épisodes intitulée «France,
détours» et partent là où ils sont invités à «interroger la France» et
capturer des situations emblématiques de la société d’aujourd’hui. Le 1er
épisode a été réalisé à la Cité du Mirail de Toulouse. Nous vous
présentons ici le second épisode, alors que le 3e épisode, en cours de
finalisation, se tient à Marseille avec des adolescents issus de milieux
aisés.
POSSIBILITÉ DE RESTAURATION PAYANTE SUR PLACE
21h – L’éducation à l’épreuve du libéralisme
Conférence-débat avec Grégory Chambat, enseignant en
collège à Mantes-la-Ville, membre du comité de rédaction de la revue
N’Autre école : « De l’école de Jules Ferry à ses contestations
politiques, syndicales et pédagogiques » ; et Pierre
Clément, doctorant (CURAPP) : « Les racines nationales et
internationales du néo-libéralisme à l’école ».
Discussion animée par Jean-Charles Royer, GFEN, enseignant de
philosophie, et Alexis Cukier, doctorant en philosophie,
SOPHIAPOL.
JEUDI 4 AVRIL
À L’ESPACE MENDÈS-FRANCE
14h – L’École : fabrique de l’impuissance ou apprentissage de la
citoyenneté ?
Conférence-débat avec Charlotte Nordmann, essayiste et
traductrice
Discutante : Marie-Hélène Motard, professeur de philosophie,
institut de recherche de la FSU.
15h30 – Savoirs et inégalités
Table-ronde avec Charles Soulié, maître de conférences à
l’université Paris 8 et Jean-Pierre Terrail, sociologue,
professeur des universités, Université de Versailles, St Quentin en Yvelines
: Comment rendre aux savoirs leur portée émancipatrice ? Comment les
transmettre pour lutter contre les inégalités ? Points de vue croisés du CP
à l’université.
Discutant : Pascal Canaud, enseignant.
AU CINÉMA TAP CASTILLE
21h – Projection-débat – 5 euros
Tempête sous un crâne de Clara Bouffartigue France /
2012 / 78 min
En présence de Clara Bouffartigue (sous réserve),
réalisatrice.
Présentation du film par Benoît Perraud, réalisateur et
programmateur, débat animé par Etienne Douat, maître de
conférences à l’université de Poitiers (GRESCO) et Cyril
Nazareth, enseignant et doctorant en sociologie.
Au collège Joséphine Baker de Saint-Ouen, en Seine-Saint- Denis, Alice et
Isabelle enseignent à la même classe tour à tour agitée, timide, joyeuse,
turbulente, mélancolique et vivante: la Quatrième C. La première est
professeure de lettres, la seconde d’arts plastiques. Tempête sous un crâne
nous plonge le temps d’une année scolaire au coeur de ce collège tenu par une
équipe énergique et soudée, dans ses couloirs et dans ses classes où les
deux professeures sont bien déterminées à trans- mettre à leurs élèves
les moyens de s’exprimer.
Issue d’une longue lignée d’enseignants, la monteuse devenue réalisatrice
Clara Bouffartigue trouve la juste distance dans ce documentaire vibrant sur
l’acte de transmission. Sans angélisme ni misérabilisme, elle cherche sa
place au sein de situations difficiles, où l’acte de filmer devient urgence
devant la passion d’enseigner. Un espace et un temps où l’éducation est un
enjeu majeur, entre refus et découvertes, entre cris de rage et fous
rires.
VENDREDI 5 AVRIL
À L’ESPACE MENDÈS-FRANCE
9h30 – Pratiques scolaires et universitaires
Conférence-débat avec Stéphane Bonnéry, maître de
conférences, université Paris 8 (ESCOL) : « Démocratisation scolaire: quels
défis?» ; Frédéric Neyrat, maître de conférences,
université de Limoges (sous réserve) ; Sylvain Broccolichi,
maître de conférences, université d’Artois (RECIFES): «Émancipation versus
disqualification: enjeux, contraintes et pratiques usuelles en situation
scolaire ».
Discutant : Ludovic Marchand, directeur d’école.
14h – Changer l’école ?
Table-ronde avec Ugo Palheta, maître de conférences,
université Lille-3, membre du comité de rédaction de Contretemps ;
Christine Passerieux, formatrice, responsable nationale du
GFEN ; Arnaud Tiercelin, responsable national de la Ligue de
l’enseignement.
Face aux ségrégations, aux difficultés à apprendre et à tous les gadgets
qui encombrent les politiques scolaires, quelles perspectives tracer pour une
école de l’égalité et de l’émancipation pour tous ?
Discutants : Magali Espinasse, professeur de lettres,
co-secrétaire académique du SNES-FSU et Tanguy Le Bolloc’h,
lecteur dans le Plac’Art.
17h – Espérer ou désespérer de l’école ?
Débat avec des élèves et des étudiants animé par Etienne
Douat, maître de conférences à l’université de Poitiers (GRESCO)
et Bertrand Geay, professeur à l’université de Picardie
(CURAPP).
À partir de quelques extraits d’entretien avec des élèves ou anciens
élèves, on propose ici d’explorer la mise en mots de la difficulté ou de la
réussite, des heurs et des malentendus qui peuvent se nouer dans les parcours
d’apprentissage, dans et hors l’école. La parole est ici d’abord celle des
principaux intéressés, les jeunes.
AU CRDP
21h – Projection-débat
L’école buissonnière de Jean-Paul Le Chanois, France
/ 1948 / 99 min
Présentation du film par Benoît Perraud, réalisateur et
programmateur, débat en présence de Stéphane Bonnéry,
maître de conférences, université de Paris 8, et de M et Mme
Geminey, instituteurs Freinet de l’après-guerre (sous
réserve)
1920, dans un petit village de Provence. M. Pascal, jeune instituteur, se
heurte au manque d’intérêt de ses élèves. Il décide de changer
radicalement ses méthodes. Il écoute les enfants, s’inspire de leurs
découvertes, les emmène dans la nature. Les élèves vont retrouver le
plaisir d’apprendre, et lui celui d’enseigner. Mais des parents et les notables
ne voient pas cette petite révolution d’un bon œil…
Ce film marque un temps fort de l’histoire du cinéma d’après-guerre :
produit par la Coopérative Générale du Cinéma Français, et tourné suivant
des méthodes nouvelles (les enfants pouvaient décou- vrir les postes
techniques du tournage…), il relate aussi les débuts du célèbre pédagogue
que fut Célestin Freinet, interprété avec brio par Bernard Blier. Jean-Paul
Chanois (1909-1985) est connu pour son grand engagement politique et
cinématographique: résistant, syndicaliste dans le milieu du cinéma, il sera
un important réalisateur engagé des années 50 mais aussi un homme de
théâtre recon- nu. Il est notamment un des co-scénaristes et co-
réalisateurs de « La Vie est à Nous », film culte du Front
Populaire.
Informations pratiques
Le festival est ouvert à tous. L’accès à l’ensemble des manifestations
est libre et gratuit, hormis à la projection de Tempête sous un crâne au
cinéma TAP Castille, le jeudi soir au tarif unique de 5 euros. La librairie La
Belle Aventure est partenaire du festival et proposera une sélection de
livres.
Les lieux
UNIVERSITÉ DE POITIERS – UFR SCIENCES HUMAINES ET ARTS
Hôtel Fumé, 8 rue René Descartes
tel. 05 49 45 45 45 – sha.univ-poitiers.fr
LA BELLE AVENTURE
15 rue des Grandes Écoles
tel. 05 49 01 32 21
CINEMA TAP CASTILLE
24 place du Maréchal Leclerc
tel. 05 49 39 40 00 – tap-poitiers.com
CRDP – CENTRE RÉGIONAL DE DOCUMENTATION PÉDAGOGIQUE
6 rue Sainte-Catherine
tel. 05 49 60 67 00 – cndp.fr/crdp-poitiers
15 rue des Grandes Écoles
tel. 05 49 01 32 21
CINEMA TAP CASTILLE
24 place du Maréchal Leclerc
tel. 05 49 39 40 00 – tap-poitiers.com
CRDP – CENTRE RÉGIONAL DE DOCUMENTATION PÉDAGOGIQUE
6 rue Sainte-Catherine
tel. 05 49 60 67 00 – cndp.fr/crdp-poitiers
Partenaires
Le festival Raisons d’agir 2013 est organisé par l’association
Raisons d’agir Poitiers et L’Associo
(Association des étudiants en sociologie de l’université de Poitiers), en
partenariat avec le cinéma TAP Castille, l’UFR Sciences humaines et
arts, l’Espace
Mendès France, l’Association
culturelle de l’UFR Lettres et Langues, la librairie La
Belle Aventure et le CRDP Poitou-Charentes, avec le soutien financier
de l’université de
Poitiers, de la ville de Poitiers, de la région
Poitou-Charentes et de la Ligue de l’enseignement.
Documents
- programme à télécharger au format pdf (600ko)
- programme à visualiser en ligne sur scribd ou issuu
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire